• Cher ange, vous êtes belle

    Cher Ange, vous êtes belle

     

    Cher ange, vous êtes belle
    A faire rêver d'amour,
    Pour une seule étincelle
    De votre vive prunelle,
    Le poète tout un jour.

    Air naïf de jeune fille,
    Front uni, veines d'azur,
    Douce haleine-de vanille,
    Bouche rosée où scintille
    Sur l'ivoire un rire pur ;

    Pied svelte et cambré, main blanche,
    Soyeuses boucles de jais,
    Col de cygne qui se penche,
    Flexible comme la branche
    Qu'au soir caresse un vent frais ;

    Vous avez, sur ma parole,
    Tout ce qu'il faut pour charmer ;
    Mais votre âme est si frivole,
    Mais votre tête est si folle
    Que l'on n'ose vous aimer.

     

    Théophile Gautier. 

    Cher ange, vous êtes belle

    Poète : Théophile Gautier (1811-1872)

    Recueil : Élégies (1830).Élégie VII.


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    Il n'y a pas d'amour heureux

     

     

    Il n'y a pas d'amour heureux

     

    Rien n'est jamais acquis à l'homme ni sa force
    Ni sa faiblesse ni son coeur et quand il croit
    Ouvrir ses bras son ombre est celle d'une croix
    Et quand il croit serrer son bonheur il le broie
    Sa vie est un étrange et douloureux divorce
    Il n'y a pas d'amour heureux

    Qu'on avait habillés pour un autre destin
    À quoi peut leur servir de se lever matin
    Eux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertains
    Dites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes
    Il n'y a pas d'amour heureux

    Mon bel amour mon cher amour ma déchirure
    Je te porte dans moi comme un oiseau blessé
    Et ceux-là sans savoir nous regardent passer
    Répétant après moi les mots que j'ai tressés
    Et qui pour tes grands yeux tout aussitôt moururent
    Il n'y a pas d'amour heureux

    Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard
    Que pleurent dans la nuit nos cœurs à l'unisson
    Ce qu'il faut de malheur pour la moindre chanson
    Ce qu'il faut de sanglots pour un air de guitare
    Il n'y a pas d'amour heureux.

    Louis Aragon

    Il n'y a pas d'amour heureux

    Poète Louis Aragon (1897-1982)

    Recueil : La Diane française (1944). 


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    Pour toujours

     

    Pour toujours



    L'espoir divin qu'à deux on parvient à former
    Et qu'à deux on partage,
    L'espoir d'aimer longtemps, d'aimer toujours, d'aimer
    Chaque jour davantage ;

    Le désir éternel, chimérique et touchant,
    Que les amants soupirent,
    A l'instant adorable où, tout en se cherchant,
    Leurs lèvres se respirent ;

    Ce désir décevant, ce cher espoir trompeur,
    Jamais nous n'en parlâmes ;
    Et je souffre de voir que nous en ayons peur,
    Bien qu'il soit dans nos âmes.

    Lorsque je te murmure, amant interrogé,
    Une douce réponse,
    C'est le mot : – Pour toujours ! – sur les lèvres que j'ai,
    Sans que je le prononce ;

    Et bien qu'un cher écho le dise dans ton cœur,
    Ton silence est le même,
    Alors que sur ton sein, me mourant de langueur,
    Je jure que je t'aime.

    Qu'importe le passé ? Qu'importe l'avenir ?
    La chose la meilleure,
    C'est croire que jamais elle ne doit finir,
    L'illusion d'une heure.

    Et quand je te dirai : – Pour toujours ! – ne fais rien
    Qui dissipe ce songe,
    Et que plus tendrement ton baiser sur le mien
    S'appuie et se prolonge !

     

    François Coppée.


    Pour toujours

     

    Poète : François Coppée (1842-1908)

    Recueil : Le cahier rouge (1892).


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    La chanson de l'automne

    La chanson de l'automne

      

    Tout suffocant
    Et blême quand
    Sonne l'heure
    Je me souviens
    Des jours anciens
    Et je pleure

    Et je m'en vais
    Au vent mauvais
    Qui m'emporte
    Deçà delà
    Pareille à la
    Feuille morte

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    Paul Verlaine

     


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    Quand les bateaux

    Quand les bateaux



    Quand les bateaux s’en vont
    Je suis toujours au quai
    Mais jamais je ne pars
    Et jamais je ne reste
    Je ne dis plus les mots
    Je ne fais plus les gestes
    Qui hâtent les départs
    Ou les font retarder

    Je ne suis plus de l’équipage mais passager
    Il faut bien plus que des bagages pour voyager

    Quand les bateaux s’en vont
    Je reste le dernier
    À jeter immobile
    Une dernière amarre
    À regarder dans l’eau
    Qui s’agite et répare
    La place qu’ils prenaient
    Et qu’il faut oublier

    Je ne suis plus de l’équipage mais passager
    Il faut bien plus que des bagages pour voyager

    Quand les bateaux s’en vont
    Je refais à rebours
    Les départs mal vécus
    Et les mornes escales
    Mais on ne refait pas
    De l’ordre au fond des cales
    Quand le bateau chargé
    Établit son parcours

    Je ne suis plus de l’équipage mais passager
    Il faut bien plus que des bagages pour voyager

    Quand les bateaux s’en vont
    Je suis silencieux
    Mais je vois des hauts-fonds
    Dans le ciment des villes
    Et j’ai le pied marin
    Dans ma course inutile
    Sous les astres carrés
    Qui me crèvent les yeux

    Je ne suis plus de l’équipage mais passager
    Il faut bien plus que des bagages pour voyager

    Quand les bateaux s’en vont
    Je reste sur le quai

    GILLES VIGNEAULT

    Quand les bateaux


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